dimanche 24 juillet 2011

Le Royaume des cieux est comparable...

  17e dimanche du Temps Ordinaire Année A (2011)
  
« Mon bonheur, c’est la loi de ta bouche, plus qu’un monceau d’or ou d’argent...
Aussi j’aime tes volontés, plus que l’or le plus précieux »
 
Par ces propos, le psalmiste nous confie sa priorité, ce qui est important à ses yeux, ce qui le fait vivre.
C’est un même contenu qu’il explicite par deux expressions : la « Loi » du Seigneur et ses « volontés ».
A l’or ou l’argent, qui suscitent tant d’attrait, le psalmiste préfère la Parole du Seigneur : c’est son « partage », son « plaisir », son « bonheur ».
 
Il en va de même dans le Premier Livre des Rois : il y est aussi question de priorité.
Lorsque Salomon, le fils du roi David, succéda à son père, il était âgé de 12 ou 14 ans, selon la tradition.
Fragilisé par ce jeune âge et l’inexpérience, il passa la nuit dans le sanctuaire de Gabaon, pour être accrédité par Dieu.
Il y reçut un songe.
Plusieurs biens lui étaient proposés : une longue vie, la richesse ou la mort de ses ennemis.
Mais Salomon leur préféra « un cœur attentif qui sache gouverner le peuple et discerner le bien et le mal ».
Il sera exaucé dans sa demande.
Tel était son essentiel : servir le Dieu de son père.
 
Fondé sur le Premier Testament, l’Evangile traite également de priorité.
Jésus nous révèle le Royaume.
Pour parler de ce Royaume, il utilise des images, appelées « paraboles ».
En ce jour, nous en découvrons trois, qui sont apparentées.
« Le Royaume des cieux est comparable à... » : la formule est chaque fois répétée.
A quoi est-il comparable ? à un « trésor caché », à un « négociant en perles fines », à un « filet » de pêche.
Et, en guise de conclusion, la fin de la parabole débouche sur une action.
 
Voyons-les d’un peu plus près.
Selon la première parabole, « le Royaume des Cieux est comparable à un trésor caché dans un champ ».
Les chercheurs de trésors étaient nombreux au temps de Jésus, comme ils peuvent l’être aujourd’hui, en quête du pactole qui leur apporterait sécurité et bonheur.
Il était courant à l’époque d’enfouir son argent dans la terre pour le mettre en sûreté, car l’insécurité était monnaie courante, tant par les guerres que le banditisme.
Cette attitude de cacher de nouveau le trésor n’a donc rien de surprenant.
De plus, puisque le propriétaire d’un champ l’est aussi de tout ce qui se trouve sous la terre, l’homme achète naturellement le champ.
 


La deuxième parabole est tissée du même fil.
Au lieu d’un trésor, c’est une perle fine qui suscite l’intérêt du négociant.
Comme l’homme de la parabole précédente, le négociant « va vendre tout ce qu’il possède et achète la perle ».
Aujourd’hui comme jadis, la perle est un bien de grande valeur et son commerce, lucratif.
 
Dans ces deux paraboles, c’est la priorité accordée à une valeur supérieure qui permet de relativiser tout le reste et de le lui sacrifier.
 
Dans la troisième parabole, une autre dimension vient s’ajouter.
Il est question d’un filet qu’on jette dans la mer.
Cette comparaison est assez caractéristique de l’évangile, où les disciples de Jésus étaient des pêcheurs.
Ce filet rapporte « toutes sortes de poissons » sur le rivage.
Il faut alors « ramasser dans des paniers ce qui est bon et rejeter ce qui ne vaut rien », comme pour l’ivraie et le bon grain, où il fallait « trier ».
Ainsi, à l’aspect de priorité, la troisième parabole ajoute celle de discernement, voire de jugement.
 
Mais en fait, quelle Bonne Nouvelle apportent ces trois paraboles ?
Que vient nous annoncer Jésus ?
Notre vie sur cette terre implique un choix, une priorité, une option.
Chacun et chacune peut se poser la question : dans ma vie, que sont ce trésor caché dans le champ, cette perle fine, ces bons poissons ?
Nous sommes invités à les identifier et à nous situer face à ce bien.
 
En ce jour, Jésus nous propose une réponse possible, qui relève de notre liberté : opter pour le Royaume.
Le Royaume des Cieux est comparable à des biens qui dépassent en valeur tout ce qu’on peut imaginer.
Les Pères de l’Eglise ont souvent identifié la perle et le trésor avec le Christ.
Nous sommes ainsi invités à faire du Christ et de sa Bonne Nouvelle le centre, le fondement, l’essentiel de notre vie.
Sa Bonne Nouvelle est révélation de l’amour de Dieu pour chacun et chacune de nous.
De cet amour, tout découle.
Grâce à cet amour, tout change : notre vie, nos relations, notre rayonnement.
Accepterons-nous de tout fonder sur cet amour ?
 
Si nous consentons, si nous optons pour le Royaume, la Joie nous est donnée, clé de lecture des trois paraboles.
La joie du chercheur de trésor qui « va vendre tout ce qu’il possède et achète ce champ ».
La joie de celui qui a trouvé une perle de grande valeur.
La joie du pêcheur qui ramène de bons poissons.
Laissons-nous conduire à la Joie par Celui qui désire notre bonheur plus que nous-mêmes…
 
Tu es béni, Dieu notre Père… toi qui révèles aux petits les mystères du Royaume !
 
Amen
Sr Marie-Jean 

dimanche 17 juillet 2011

L'Esprit vient au secours de notre faiblesse

Méditation pour le 16ème dimanche de l’année A
 
Aujourd’hui, la brièveté de la 2ème lecture semble être là pour compenser la longueur de l’Évangile.
Brièveté ? Mais attention : cette lecture vaut son pesant d’or ! Écoutez : « frères et sœurs, l’Esprit Saint vient au secours de notre faiblesse, car nous ne savons pas prier comme il faut. » Qui d’entre nous pourrait prétendre savoir prier parfaitement sans l’aide de l’Esprit Saint ? Mais quelle consolation, quelle tranquille assurance quand nous entendons saint Paul lui-même nous affirmer : « l’Esprit s’en occupe ». Et cela ne nous dispense certes pas de prier ! Mais cela nous invite à prier sans inquiétude, à faire de notre prière avant tout une disposition intérieure d’ouverture à l’Esprit, dans l’assurance que l’Esprit fera le reste, et le fera bien, puisque, connaissant la volonté de Dieu, il ne peut se tromper par rapport à elle, il ne peut nous fourvoyer…
Cette assurance nous permet d’aborder l’évangile : trois paraboles suivies de l’explication de la 1ère des trois. Et en cours de route cette affirmation de l’évangéliste que « Jésus ne leur disait rien sans employer de paraboles ». Nous l’avons déjà constaté dimanche dernier : quand Jésus enseigne – et surtout quand il veut faire comprendre des choses difficiles – il raconte des histoires. D’emblée, quand quelqu’un nous raconte des histoires, nous dressons l’oreille : c’est agréable à écouter, cela fait marcher l’imagination et cela s’imprime beaucoup mieux dans la mémoire… Mais c’est une histoire, pas une vérité dogmatique à l’état brut : cela demande à être interprété, prolongé dans une expérience de vie.
Les trois paraboles d’aujourd’hui ont certainement ceci en commun : il ne faut pas se fier aux apparences.
Le levain, c’est peu de chose par rapport à la masse de la pâte. Mais celles et ceux d’entre nous qui font du pain le savent bien : le levain, ça change tout. Grâce à lui, il y a tout un travail de mûrissement qui se fait et qui transforme le tout. Pour faire le lien avec la lettre aux Romains, le travail du levain dans la pâte, c’est comme le travail de l’Esprit dans notre âme quand nous prions.
Même travail de mûrissement pour la graine de moutarde. Ne vous fiez pas aux apparences : sa petitesse n’augure rien de la grandeur de l’arbre qui en sortira. Et la moutarde, en plus, donne du piquant : elle est capable de relever le goût de tout un plat. Ne nous fions pas aux apparences : si petite, si pauvre soit notre prière, si l’Esprit l’anime, elle peut soulever le monde.
La parabole de l’ivraie dans le champ, quant à elle, nous enseigne qu’il y a d’autres circonstances où il ne faut pas se fier aux apparences. Quand nous voyons mûrir un champ de blé, au début, nous n’y voyons rien d’indistinct. Mais au fur et à mesure du mûrissement, nous découvrons que le bon blé est mêlé d’autre chose : notre champ n’est pas aussi pur que nous le croyions. Qui n’a pas fait cette expérience pour lui-même dans le jeu des relations humaines ? Au début, tout baigne… À mesure que la relation s’approfondit, on découvre en son propre cœur que tout n’est pas « pur » dans nos intentions, que nous avons des idées derrière la tête, peut-être des jalousies, des colères. D’où viennent-elles ? D’où viennent, en fin de compte, les rivalités, les tensions, les violences… oui, même les guerres ?
Dans la parabole, les serviteurs disent au maître : « Seigneur, n’est-ce pas du bon grain que tu as semé dans ton champ ? D’où vient donc qu’il y a de l’ivraie ? » (signalons, au passage, que le mot grec que l’on traduit par ivraie, c’est la « zizanie »). Le maître de la parabole donne une réponse évasive : « c’est un ennemi qui a fait cela ». Dans l’explication qui vient après, Matthieu fait dire à Jésus : « l’ennemi, c’est le démon ».
Cette réponse nous semble un peu brève… Mais nous sommes comme les disciples : nous aimons avoir des réponses à nos questions, cela nous rassure, nous voulons savoir d’où vient le mal. En disant « c’est le démon », Jésus veut peut-être dire deux choses : la cause du mal n’est pas en Dieu… mais comme telle, elle n’est pas en nous non plus… Aujourd’hui, les sciences humaines nous ont appris que tout cela est assez complexe. Que les rivalités, les jalousies, les petites et grandes tensions de nos vies, bref, la zizanie, qu’elle soit à l’intérieur de nous ou dans nos relations avec les autres, a presque toujours son origine dans des blessures, parfois très anciennes, parfois vieilles de plusieurs générations. Et souvent, cela nous échappe. Souvent, nous ne pouvons pas agir sur la cause du mal. Dans la parabole, l’ivraie est semée dans le champ alors que tout le monde dort.
Mais alors, comme dans la parabole, nous avons envie d’agir sur le mal quand il se fait jour, arracher l’ivraie. Le maître voit plus loin : il nous arrête dans notre zèle mal éclairé : si l’ivraie est inextricablement liée au bon grain, ne faites pas le tri vous-mêmes, vous risqueriez de jeter le bébé avec l’eau du bain…
Que faire alors ? Baisser les bras ? Se soumettre à la fatalité ? La réponse proposée par la parabole déplace la perspective : elle ne dit pas ce que nous devons faire devant le problème de la zizanie (elle ne nous donne pas un cours de morale), mais elle nous montre quelque chose de Dieu, de sa façon d’agir avec nous, avec le cœur de l’homme où se mélangent le bien et le mal. Et la clé de tout, c’est la patience.
Ici encore, osons un lien avec la lettre aux Romains : permettez-moi un jeu de mots : nous ne savons pas « trier comme il faut », nous ne savons pas, par nous-mêmes, faire le tri entre le bon grain et l’ivraie. Mais si nous laissons venir l’Esprit, nous ne serons pas écrasés par le découragement. Nous savons que l’Esprit connaît les intentions de Dieu. Patiemment, il travaille…
Patience donc ! Voilà le mot du maître de la parabole. Voilà le bel attribut de Dieu que nous présente la 1ère lecture, du livre de la Sagesse. C’est parce qu’il « domine toute chose » que Dieu – à la différence des tyrans humains – peut se montrer patient. « Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère, plein d’amour et de vérité », nous dit le psaume 85. Et cette patience de Dieu devant nos cœurs mélangés (devant nos champs mêlés de bon grain et d’ivraie) opère un miracle inattendu. Un miracle qui n’attend pas le dernier jour, le jour du jugement, de la moisson, du tri définitif, un miracle qui commence dès maintenant, dès l’instant où nous laissons entrer l’Esprit : avez-vous jamais vu l’ivraie devenir du bon blé ? Eh bien, en Dieu, c’est possible. C’est ce que dit la dernière phrase de la 1ère lecture : « tu as pénétré tes fils d’une belle espérance : à ceux qui ont péché, tu accordes la conversion. » Ainsi, l’ivraie elle-même trouve sa place dans le plan de Dieu. Comme lui, ayons de la patience : laissons-nous « travailler » par l’Esprit !
Sr Marie-Raphaël 

lundi 11 juillet 2011

Heureux

Méditation pour la fête de saint Benoît (Pv 2,1-9 ; Ps 33, Col 3, 12-17 ; Mt 5, 1-12a )
 
Le lectionnaire bénédictin propose trois évangiles différents pour la fête de ce jour. Celui des béatitudes, avec sa note de joie, n’est-il pas opportun pour un jour de fête rehaussé par un jubilé. Faire profession au jour de la fête de st Benoît, pour une sœur bénédictine, c'est un beau programme. Il y a aujourd’hui 50 ans, sr Godelieve, tu faisais profession donnant ta vie à Dieu.
Donner quelques jours, voire quelques semaines, ou même un an... ce n’est guère un problème. Tenir dans la durée, dans la stabilité : c'est une autre paire de manches ! C’est toi qui pourrais témoigner aujourd’hui chère sr Godelieve, de l’humble patience, de la persévérance qu’il y faut.
Mais si on te demandait ce qui rend ce chemin possible, sans doute nous dirais-tu que c’est dans l’abandon de tout son être, dans l’ouverture à Dieu renouvellée chaque matin qu’un chemin se dessine, que l’élan se renouvelle. Les béatitudes que nous venons d’entendre, disent cela.
Dans l’accueil d’un cœur ouvert, dépouillé, d’un cœur de pauvre, Dieu peut déposer le trésor de son Royaume. A qui pleure, Dieu peut offrir la consolation de sa tendre proximité. Celui que la douceur habite, ne manquera de rencontrer Dieu dans le petit et le pauvre croisés au long des jours. Pour lui s’ouvre un monde nouveau, où la qualité de la relation l’emporte sur le prestige et le pouvoir. Avec un cœur épris de justice, Dieu peut bâtir le monde nouveau et la terre nouvelle, fondés sur sa justice qui est amour offert inlassablement. D’un cœur travaillé par la miséricorde de Dieu, jaillit la miséricorde. Au cœur pur est offert la transparence du regard qui découvre Dieu comme en filigrane en toute créature. A l’artisan de paix, se découvrent les trésors de paix, dons de l’Esprit.
 
Mais nous savons bien que ces béatitudes surtout dans la version de Matthieu, plus qu’un programme, sont d’abord un portrait : celui de Jésus lui-même. Celui que nous nous sommes engagées à chercher au long des jours, dans l’humble travail, dans la prière et le service fraternel.
 
Le livre des Proverbes, auquel Benoît a emprunté bien des expressions de sa Règle, nous invite à chercher la sagesse plus qu’un trésor. Cette sagesse, ce n’est pas un code de conduite, ce n’est pas un système de pensée. La sagesse que nous cherchons, c'est une personne, c’est Jésus lui-même. Sagesse de Dieu, qui à vue humaine peut paraître folie... lorsqu’elle s’agenouille par exemple pour laver les pieds de ses disciples. Sagesse qui se dit dans la démesure de l’amour livré jusqu’au bout. En inclinant l’oreille de notre cœur, à l’écoute de la Parole de Dieu dans la lectio, comme aussi à l’écoute du quotidien, nous la découvrirons. Jésus viendra faire en nous sa demeure. Et nous vivrons en sa présence. Nous vivrons de sa présence.
 
Fêter un jubilé, c’est d’abord rendre grâce à Dieu pour sa longue fidélité. C’est ensuite, recevoir de lui l’abondance de son amour qui sans cesse nous renouvelle. Le jubilé implique une remise à neuf, une remise des dettes, pour un nouveau départ.
 
Que le Seigneur qui t’a choisie, aimée, appelée, renouvelle aujourd’hui pour toi, ses merveilles, et qu’il nous conduise ensemble à la joie éternelle. Joie éternelle qui est de voir Dieu face à face et non plus seulement dans nos miroirs toujours un peu déformants ! Oui, que le Seigneur fasse ruisseler sur toi l’abondance de ses bénédictions, et unisse ton offrande à la sienne.
Sr Thérèse-Marie 

vendredi 1 juillet 2011

Fontaine d'amour

Méditation pour la fête du Coeur de Jésus
Dt 7,6-11 ; Ps 102 ; 1 Jn 4, 7-16 ; Mt 11,25-30
 
Fallait-il inscrire au calendrier la solennité du Cœur de Jésus ? La fête de la Trinité, célébrée il y a à peine 15 jours ne nous chantait-elle pas déjà à merveille l’amour du Seigneur ? Que vient ajouter la célébration d’aujourd’hui ?
 
En écoutant les lectures, nous avons accueilli l’amour fou de notre Dieu, qui s’est épris de son peuple, qui s’éprend des petits. Dieu s’éprend de chacun, chacune, librement, gratuitement ! C’est un déferlement d’amour, auquel nous sommes invités à répondre. Réponse offerte dans la loi proposée, une loi pour nous humaniser, nous diviniser ! Réponse offerte dans un amour tourné vers les frères et sœurs tout autant que vers Dieu.
 
Peut-être la spécificité de la fête d’aujourd’hui réside-t-elle dans le fait de porter nos regards vers le cœur de Jésus, un cœur pleinement humain en lequel s’exprime l’amour divin. On a peut-être déformé ce merveilleux signe, en parlant de Sacré-Cœur, le mettant ainsi comme à part de notre humanité, alors que là réside la pointe de la fête : l’amour de Dieu parfaitement dit, parfaitement accompli en un cœur humain ! Un cœur comme le nôtre, capable d'aimer comme Dieu !
 
Bernanos en avait bien saisi la grandeur lorsqu’il écrivait : Il a aimé comme un homme, humainement, l’humble héritage[1] humain, son pauvre foyer, sa table et son vin – les routes grises, dorées par l’averse, les villages avec leurs fumées, les petites maisons dans les haies d’épines, la paix du soir qui tombe, et les enfants jouant sur le seuil. Il a aimé tout cela humainement, à la manière d’un homme, mais comme aucun homme ne l’avait jamais aimé, ne l’aimerait jamais. Si purement, si étroitement, avec ce cœur qu’Il avait fait pour cela, de ses propres mains. »[2]
 
L’Évangile d’aujourd’hui nous montre cette sensibilité du cœur humain de Jésus qui en fait un réceptacle unique de l’amour du Père, de sa joie. Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange,... Dans la vibration du cœur de Jésus, c’est la passion unique de notre Dieu qui s’offre à nous. Dans l’élan de son cœur humain, il nous invite à partager cette passion. Personne ne connaît le Père, sinon le Fils, et celui à qui le Fils veut le révéler.  En Jésus un cœur humain, a accueilli l’amour divin, pleinement. Et il nous y donne accès. Et nous provoque à être à notre tour, aujourd'hui, tout à la fois même réceptacle et même amour fou pour celles et ceux qui croisent nos chemins !
 
Venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, moi je vous procurerai le repos. Au long de l’Évangile, nous percevons toute la sensibilité de Jésus aux détresses humaines, comme toute sa sensibilité à la beauté de la création, toute sa sensibilité à l’amour du Père.
Prenez sur vous mon joug, devenez mes disciples, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos. Oui, mon joug est facile à porter, et mon fardeau léger.
Jésus vrai homme, nous convie à partager son humanité. Une humanité pleinement accordée au projet du Père. Il nous propose son joug. Quel est-il ?
Dans le Deutéronome, l’observance de la loi est présentée comme la réponse d’amour que Dieu espérait de l’homme. Les Écritures ont comparé la loi à un joug[3].  
Avec Jésus cette loi est devenue l’unique commandement de l’amour, le joug est devenu une relation personnelle, ce que les Odes de Salomon ont merveilleusement chanté en mettant sur les lèvres du Ressuscité cette parole :
Comme le bras du fiancé sur sa fiancée,
ainsi mon joug sur ceux qui me connaissent.[4]
 
La fête de ce jour, nous invite à laisser Jésus poser son bras sur nos épaules, en une tendresse de fiancé. La fête de ce jour nous invite à unir nos cœurs à celui de Jésus, pour devenir avec lui réceptacle de l’amour, fontaine d’amour, pour la joie de Dieu et pour celle de l’humanité entière.
 Sr Thérèse-Marie

[1] litt : l’humble hoirie humaine
[2] Georges BERNANOS, La joie, Plon, Paris 1929, p 251
[3] Jér 5,5 ; Act 15,10 ; Sir 6, 23-30 parle du joug de la sagesse qui procurera joie à qui s’y soumet. De même Sir 51,23 sv
[4] Odes de Salomon, n°42 (trad. Guiran et Hamman, éd. DDB, 1981, p. 67)