dimanche 30 octobre 2011

Un Dieu qui nous aime

30 octobre 2011 :  méditation pour le 31ème dimanche A
Ce WE, avec un groupe d’hôtes flamands, nous découvrons quelques textes de Jean Ruusbroec, mystique brabançon du 14ème siècle. Je voudrais vous partager quelques perles de son message. Il me semble que des liens se tissent entre ce que nous apprenons de lui et les lectures de ce dimanche.
1. Tout d’abord, Ruusbroec nous invite à un voyage vers l’intériorité, l’intérieur de nous-mêmes. Il se situe à une époque où la foi chrétienne redécouvre l’importance de l’intériorité, lieu d’une rencontre personnelle et aimante avec Dieu. Le but de la vie chrétienne est de progresser sur ce chemin intérieur, vers une union de plus en plus intime avec Dieu. Or, ce voyage à l’intérieur commence toujours à l’extérieur, c’est-à-dire dans ce qui est visible, dans ce que nous réalisons concrètement, dans nos œuvres. Il faut passer de l’extérieur vers l’intérieur, vers une dimension plus profonde de notre être. Ce qui vient d’abord, c’est ce qui est visible et extérieur. Ensuite, on descend dans l’intime. Mais c’est pour constater qu’en fait, l’intérieur était toujours déjà là et que notre façon de vivre à l’extérieur est en fait le reflet de notre intériorité.
Or, dans l’évangile d’aujourd’hui, Jésus reproche précisément aux scribes et pharisiens d’attacher tant d’importance aux apparences, aux choses extérieures, que leur intériorité elle-même se vide de toute substance. Ils agissent pour être remarqués des hommes, ils portent des vêtements spéciaux, ils aiment les salutations sur les places publiques... mais : « ils disent et ne font pas ». En cela, ils ne valent pas mieux que les prêtres du Temple fustigés par le prophète Malachie dans la 1ère lecture, ceux qui « pervertissent l’alliance » de Dieu et font de la Loi une occasion de chute pour les autres.  Non, Jésus n’est pas tendre avec eux ! Plus leur responsabilité est grande, plus ils devraient faire correspondre en eux-mêmes l’intérieur et l’extérieur. Et que cette intériorité soit vraiment tournée vers Dieu.
Wat Jezus aan de farizeeën en de Schriftgeleerden verwijt is niet zozeer wat ze zeggen dan wat ze doen… of liever niet doen! Ze maken van de Wet een struikelblok voor de kleinen: dat verdraagt Jezus helemaal niet! Hetgeen de strengheid van zijn toon verklaart. Als de farizeeën Ruusbroec beter hadden gelezen, dan hadden ze waarschijnlijk beter begrepen dat het innerlijke het uiterlijke moet bewegen en niet andersom.
2. La deuxième perle que je voudrais relever chez Ruusbroec, c’est qu’il décrit le vrai mystique comme celui qui agit à partir de la source qui est en lui, mais qui n’est pas lui. Le mystique n’est pas passif, il est éminemment actif, mais son activité est irriguée par la source divine qui agit à travers lui.
Cela rejoint ce que Jésus dit encore dans l’évangile : ne vous faites pas appeler « Rabbi » ou « maître » ou « père », car vous n’avez qu’un seul Père, un seul maître. Se faire appeler « maître », cela donnerait l’impression que notre enseignement vient de nous-mêmes. Au contraire, le mystique connaît la vraie source de son message, et cela lui donne peut-être d’autant plus d’assurance, mais dans l’humilité. Regardez ce que saint Paul dit aux Thessaloniciens : « quand vous avez reçu de notre bouche la parole... vous l’avez reconnue pour ce qu’elle est vraiment : la Parole de Dieu ». Paul s’efface derrière le message qu’il porte.
De mysticus, de vriend van God, weet ook dat God – en niet hijzelf – aan de oorsprong ligt van zijn handelen. Hij laat zich bevruchten door Gods aanwezigheid om daadwerkelijk Gods aanwezigheid verder door te geven. Zo ook Paulus jegens de Thessalonicenzers.
3. La troisième perle, c’est que Ruusbroec ne cesse de nous inviter à comprendre toujours la même chose : notre relation à Dieu est une relation d’amour, notre Dieu est un Dieu qui nous aime. L’amour comporte aussi cette dimension très affectueuse que nous rencontrons dans les paroles de saint Paul aujourd’hui : « avec vous, nous avons été pleins de douceur, comme une mère qui entoure de soins ses nourrissons... ayant pour vous une telle affection, nous voudrions vous donner tout ce que nous sommes, car vous nous êtes devenus très chers... » Quelle déclaration d’amour ! Quel contraste, aujourd’hui, entre Paul et Jésus, entre la tendresse de Paul et la sévérité de Jésus ! Mais ne nous y trompons pas : la sévérité de Jésus n’est autre que le revers de sa tendresse infinie pour les petits. C’est en raison de cet amour même qu’il se montre si exigeant envers les autorités, envers ceux qui pourraient « scandaliser » les petits par leur comportement inadéquat. Tendresse, donc. Comme une mère pour son tout petit. Comme un tout petit contre sa mère, comme l’a dit le psaume. Un amour entre Dieu et nous, qui doit sans cesse grandir, s’élargir, s’approfondir : l’amour bouge toujours, nous dit Ruusbroec. Il y a des étapes dans cet amour, ce n’est jamais fini, même pas dans l’éternité.
Laat ons dus uiteindelijk gewoon binnenkomen in eindeloze liefdesrelatie, met innige vreugde, in het bewustzijn dat de bron ons niet in de steek laat, dat we van dienaar tot vriend mogen worden, en van vriend tot zoon genodigd worden.

Sr Marie-Raphaël 
 

vendredi 28 octobre 2011

Un appel, une invitation, une mission

En cette fête des Saints Simon et Jude, Jésus nous proclame une Bonne Nouvelle !
Sur ce chemin, où Jésus nous précède, on repère trois étapes : un appel, une invitation, une mission.
 
D’abord, un appel : Jésus appelle douze disciples.
Parmi ces douze, deux émergent, ceux que nous fêtons en  ce jour :
D’un côté, Simon, appelé le « zélote », membre d’un parti opposé à l’occupant.
De l’autre, Jude, fils de Jacques.
Ces douze Apôtres que Jésus a choisis lors de son ministère terrestre sont autant de visages différents, mais à la suite du même Christ.
Ajoutons que le chiffre douze est symbolique.
Il évoque certes une dimension de plénitude, mais il suggère aussi que le nombre des Apôtres n’est pas clos : nous sommes tous et toutes concernés.
Chacun et chacune de nous est invité à suivre Jésus : son appel en ce jour nous est destiné !
 
Ensuite, cet Evangile est une invitation.
Luc rapporte qu’« en ces jours-là, Jésus s’en alla dans la montagne pour prier et il passa la nuit à prier Dieu. Le jour venu, il appela ses disciples ».
Et, plus loin, l’évangéliste poursuit : « Jésus descendit de la montagne avec les douze Apôtres… ».
La montagne est le lieu symbolique de la présence de Dieu : selon la tradition du Premier Testament, le Dieu d’Israël s’y manifesta à maintes reprises et y révéla tout son Amour.
Jésus s’inscrit dans cette tradition.
Sur cette montagne, il se laisse habiter par cet Amour de Dieu… et il nous convie à monter avec lui pour goûter sa présence, entendre et y réentendre son appel, s’abreuver à la source de son Amour et s’enraciner dans sa Parole.
 
Enfin, cet Evangile nous offre une certitude, qui nous conduit à une mission.
Luc déclare : « … dans la plaine, il y avait un grand nombre de ses disciples, et une foule de gens venus de toute la Judée, de Jérusalem et du littoral de Tyr et de Sidon… »
Forts de l’Amour de Dieu, confiants dans la certitude de son secours, nous pourrons reprendre le chemin… et redescendre, avec Jésus, dans la plaine.
Nous rencontrerons alors de multiples visages : foule bigarrée de « disciples », d’une foule de gens, et de tous les souffrants de notre monde.
 
L’Evangile nous redit que Jésus fait de nous des apôtres, des envoyés !
L’appel de Jésus, ce temps passé sur la montagne en sa présence, son compagnonnage sur nos routes humaines renouvelle et transforme notre regard, nos gestes et nos paroles…
 
En ce jour de fête, rendons grâces pour la mission que Jésus nous confie !
Et, dans le sillage des saints Simon et Jude, Dieu nous promet la même fécondité que celle des Apôtres, selon les mots du psalmiste :
« Ce qu’ils proclament a retenti par toute la terre,
et leur parole, jusqu’au bout du monde »

Sr Marie-Jean 

mardi 18 octobre 2011

Ouvrier de la paix

Méditation pour la fête de saint Luc 18 octobre 2011
(2 Timothée 4,9-17b ;  Psaume 145(144),10-11.12-13ab.17-18.; Luc 10,1-9 )
Parmi ses disciples Jésus en désigna encore 72.  Comme quoi il n’en a jamais assez. Il en avait désigné 12, et les avait envoyés en mission, maintenant ce n’est plus 12 mais 72.
Il les envoie deux par deux. C’est une image à garder longtemps devant les yeux. On n’a pas sa petite mission à soi, on n’est pas propriétaire de son apostolat, de son clocher,... Non, les disciples véritables participent de la grande mission de Jésus, et deux par deux sont envoyés devant lui. Il y a un soutien fraternel dans le fait d’être envoyé deux par deux. Il y a aussi le témoignage de ce soutien fraternel. C’est à l’amour que vous aurez les uns pour les autres, qu’on vous reconnaîtra pour mes disciples. Ils ne se sont pas choisis, Jésus les a désignés et envoyés. Envoyés pour être témoins de Jésus, il faut être deux pour que le témoignage soit reçu !
Et vient alors cette invitation à la prière : La moisson est abondante et les ouvriers peu nombreux... Pourtant, à lire l’envoi de 72 autres, on aurait pu croire que ce n’était pas les ouvriers qui manquaient... Peut-être l’appel est-il plus profond. Il ne suffit pas d’avoir été désigné et envoyé par Jésus, pour être un véritable ouvrier. Il n’y a aucune magie : ce n’est pas parce qu’on est ordonné, ou nommé catéchiste, ou qu’on a fait profession de moniale, qu’on est ouvrier... Il y faut une adhésion personnelle. Et là, nous recommande Jésus, priez ! Oui, priez pour que les envoyés deviennent ouvriers !
Ce n’est pas la moisson qui manque, ce sont les ouvriers. Voilà un bel angle de vue à méditer. On a peut-être trop tendance de nos jours à trouver que les épis se font rare... n’est-ce pas notre regard qui ne sait pas voir l’abondance des épis dans les champs du Seigneur ? Peut-être tout simplement parce que nous limitons à nos vues ces champs, et ne voyons pas, que le Seigneur lui, il sème à tort et à travers, sur toutes les terres, et même sur les chemins, ... La moisson est abondante, mais les ouvriers sont peu nombreux !
Quels seront ces ouvriers ?
 Ils n’emportent, ni argent, ni sac, ni sandales.  Ce sont des hommes libres, comme le vent, le vent de l’Esprit. Ce sont des pauvres, ils n’iront pas à la rencontre de leurs frères imbus de leur être, de leur savoir, de leur mission. Ce sont des pauvres qui ont les mains vides : ils peuvent être de bons ouvriers pour la moisson, récolter dans les champs du Seigneur, ce qu’ils n’ont pas semé !!! Aucune gloire, aucun prestige.  A croire que François d'Assise méditait souvent ce texte !
 
Ne vous attardez pas en salutations. Ne jouez pas les grands personnages ! Je ne pense d’ailleurs pas que des agneaux s’amusent à saluer les loups, sinon dans les fables de La Fontaine... Et encore ! !!! Vous êtes envoyés dans la fragilité de votre être, de votre vie, au milieu d’un monde qui est fort, parfois hostile. Vous êtes témoins de l’Agneau immolé, et non d’un potentat sanguinaire !
Dans toute maison où vous entrerez dites d’abord « paix à cette maison »
L’ouvrier de la moisson du Père, moissonne par la paix qu’il apporte ! La paix qu’il respire, la paix qu’est le Christ. Pour être porteur de paix, il faut avoir les mains vides. Vous le savez dès qu’on est propriétaire, on bâtit des murs pour protéger ses biens. On achète des coffres, puis on paie des gardes. On achète des armes et on tire sur tout qui n’est pas comme nous.... Le porteur de paix avance les mains vides, le cœur ouvert. Et alors l’ouvrier va partager simplement, humblement la vie de ceux qui l’accueillent. Là il pourra guérir, par sa simple présence. Et là il témoignera : le règne de Dieu est tout proche de vous. Non pas qu’il se prenne pour celui qui a apporté ce règne, mais parce qu’il discerne tout simplement dans cette humanité qui s’est ouverte à lui, dans cet échange de paix, la présence du Royaume.
Voilà les ouvriers qui sont attendus, voilà l’ouvrier que fut saint Luc.
Rendons grâce, et prions qu’il nous soit donné de devenir ouvrier selon le cœur de Dieu. 
Sr Thérèse-Marie 

dimanche 16 octobre 2011

Rendez à Dieu...

Méditation pour le 29ème dimanche du temps ordinaire, année A 2011
 (Is 45,1.4-6a ; Ps 95 ; 1 Thess 1,1-5b ;  Matth 22,15-21 ) 
Alors, vous payez vos impôts ? avec ou sans fraude ? bon allez, je ne vais pas faire une enquête à main levée !
Mais dites-moi que veut nous suggérer l’évangile d’aujourd’hui ?
Nous sommes après l’entrée de Jésus à Jérusalem, juste quelques jours avant sa condamnation et sa mise à mort. Nous devrions lire ce texte en pleine semaine sainte ! Dans les récits de la passion, en Saint Luc, les anciens du peuple, les chefs religieux, ont emmené Jésus devant Pilate et porté contre lui cette accusation : « Nous avons trouvé cet homme mettant le trouble dans notre nation, empêchant de payer les impôts à César et se disant Christ Roi ». Le récit d’aujourd’hui semble donc avoir nourri cette accusation.
Alors que se passe-t-il en fait ?
Face à l’impôt imposé par le pouvoir romain, les pharisiens ont tendance à résister, ils ne veulent pas se corrompre avec ces païens de romains (hé oui, à l'époque... les romains on les traitait de païens!!!). A l’opposé, les hérodiens sont acquis à la cause romaine, et préconisent la collaboration. Les zélotes font opposition totale. Bref, la question posée à Jésus est plus que piégée. Sa réponse ne peut que le mettre en difficulté avec un groupe ou l’autre.
Donne-nous ton avis, est-il permis oui ou non, de payer l’impôt à l’empereur ? 
Jésus ne fait dans la dentelle au niveau de sa réponse première : il sait la perversité de ses interlocuteurs : il les traite d’hypocrites. A coté de la plaque autrement dit ! Pourquoi voulez-vous me mettre à l’épreuve ? pourquoi voulez-vous me tenter ? Les voilà démasqués, ils jouent le rôle de Satan !  Jésus aurait pu s’arrêter là. Mais il choisit de poursuivre. Et il commence de façon pour le moins humoristique : montrez-moi la monnaie de l’impôt. Car l’impôt ne se payait qu’avec une monnaie spéciale, impure, avec laquelle on ne pénétrait pas dans le Temple. Ils lui présentèrent une pièce d’argent. Bien, c’est donc qu’ils en ont sur eux ! Ils utilisent donc la monnaie du régime romain. Et on est dans le Temple ! Voilà qui les met en cause !  Jésus poursuit : Cette image et cette inscription de qui sont-elles ?  De l’empereur César, répondent-ils.  Et Jésus conclut : Rendez donc à César ce qui est à César.  Remarquez : il ne dit pas payez ou donnez à César, comme la question lui avait été posée... mais rendez ! Vous jouissez du confort de la société romaine, vous utilisez sa monnaie, ses infrastructures. La société dont vous profitez vous donne non seulement des droits mais aussi des devoirs. Bref, Jésus ne conteste pas le fait de payer ses impôts.
Mais il poursuit et transcende la question : Rendez donc à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu. Jésus avait interrogé sur l’image et l’inscription figurant sur la monnaie... il s’agit de César, et l’inscription mentionne : « ô Tibère César, fils du divin Auguste »... Jésus après avoir fait rendre sa monnaie à César, le remet à sa place... il n’est pas Dieu ! C’est à chacun qu’il faut rendre ce qui est sien. Donc rendez à César ce qui est à lui, c’est normal ; mais rendez d’abord à Dieu ce qui est à lui. Et qu’est-ce qui est à Dieu ? Qu’est-ce qui porte l’image et l’inscription de Dieu ? Nous le savons depuis la première page de la Bible : Dieu créa l’homme à son image et à sa ressemblance, homme et femme il les créa.
Voilà ce qui lui est dû à Dieu ! Et c’est ce que Jésus n’a cessé de répéter au long de sa vie prophétique.
Arrêtez ce commerce au Temple, arrêtez ces lois de pseudo-pureté qui à coup de parvis et séparations, écartent les petits, les pauvres du lieu de la rencontre. Rendez à Dieu ce qui est à Dieu.  
Arrêtez ce pouvoir écrasant sur le peuple, souvenez-vous de cette parabole de la vigne que nous avons entendue il y a 15 jours. Où ceux qui avaient reçu mission de veiller sur la vigne, sur le peuple de Dieu, ont détourné le fruit de la vigne à leur profit. Rendez à Dieu ce qui est à Dieu.
Voilà ce qui est à Dieu : son Fils, et en lui tous ses enfants, c'est-à-dire son Peuple.
Rendez à Dieu ce qui est à Dieu... arrêtez aussi bien hérodiens que pharisiens ou romains, arrêter d’opprimer le peuple, arrêter de le poursuivre de vos lois et tracasseries. Arrêter de poursuivre le Fils de Dieu, de lui chercher malheur, il est à Dieu !
Jésus ici ne nous interdit nullement de nous occuper de politique et d’économique, il nous demande d’ordonner cet économique et ce politique à Dieu, à son projet divin d’amour pour tous.
Il remet en place la notion de pouvoir : un pouvoir, c’est un service, une mission ordonnée au plan du Dieu unique et vrai. Jésus l’avait rappelé à ses disciples, juste avant d’entrer à Jérusalem : Vous savez que les chefs des nations dominent sur elles en maîtres et que les grands (aussi bien politiques que religieux) leur font sentir leur pouvoir. Il ne doit pas en être ainsi parmi vous : au contraire, celui qui voudra devenir grand parmi vous, sera votre serviteur !   
Alors rendez à Dieu ce qui est à Dieu, rendez à la vie les petits, les pauvres, qui sont ses images, restaurez la vie en eux. Voilà dans quel esprit vous vous demanderez si le pouvoir politique ou religieux est légitime ou non, dans sa manière d’honorer tous les hommes qui sont à Dieu !
Cherchez une vie de respect, où ensemble on construit la cité de manière telle que Dieu y soit honoré en chacun !  
Cela changera-t-il nos relations au quotidien ? c’est en tout cas l’invitation qui nous est lancée !
Sr Thérèse-Marie 

samedi 15 octobre 2011

Femme de feu

15 octobre : fête de sainte Thérèse d’Avila.
 Pour sainte Thérèse d’Avila, la liturgie propose un tel choix de textes qu’on dirait bien que l’on n’a pas su trancher, tant était riche et diversifiée la personnalité de cette grande sainte.
Pour l’AT, on pouvait choisir entre le Cantique des cantiques (8, 6-7) et le livre de la Sagesse (7, 7-14). Pour la 2ème lecture, deux extraits différents de la lettre aux Romains (8, 22-27 ou 8, 14-17.26-27). Pour l’évangile, trois possibilités : Lc 6, 43-45 ; Jn 4, 5-15 ou Jn 15, 1-8. Toute cette variété de lectures honore en Thérèse* :
La femme amoureuse, passionnée de Dieu,
La femme de sagesse qui a su faire les bons choix,
La femme de prière,
La femme qui a traversé mainte épreuve et les a vécues en Dieu, comme des douleurs d’enfantement,
La femme qui a rencontré Jésus au bord du puits et s’entend dire « si tu savais le don de Dieu »,
La femme qui a réellement « donné à boire à Jésus et qui a senti jaillir en elle la source de vie,
La femme « attachée » à Jésus comme le sarment à la vigne et irriguée de sa sève,
La femme que l’on a reconnue au bon fruit qu’elle a porté…
Réjouissons-nous de cette riche et foisonnante personnalité et laissons-nous toucher par quelques images qui nous ferons progresser, nous aussi, dans cet intrépide amour de Dieu.
 
À propos du texte de Sagesse :
Comme le roi Salomon dans le livre de la Sagesse, Thérèse a invoqué Dieu et a reçu de lui « l’esprit de la sagesse ». Elle l’a préférée aux trônes et aux sceptres, aux richesses extérieures, elle l’a aimée plus que santé et beauté… Quelle sagesse ? Une folie : la folie de Dieu. Dans ce vent de folie, elle a fait des choix et entrepris des choses que toute sagesse humaine aurait freinées. Thérèse n’aurait rien renié de ces mots : « la sagesse est pour les hommes un trésor inépuisable. Ceux qui l’acquièrent s’attirent l’amitié de Dieu. Or, Thérèse savait d’expérience que l’amitié de Dieu n’est pas une sinécure !
 
Cette familiarité avec Dieu est aussi celle qu’évoque saint Paul quand il parle de l’Esprit : l’Esprit nous donne l’audace d’appeler Dieu « Abba ! », à la manière de Jésus, et de lui exprimer nos prières les plus folles, dans l’assurance qu’il nous exauce toujours. Car si l’Esprit habite notre prière, elle va nécessairement dans le sens de la volonté de Dieu.
Telle était la familiarité de Thérèse avec son Dieu, tel est le chemin qu’elle nous invite à prendre aussi.
 
L’évangile parle d’arbres et de fruits. L’arbre au pied duquel s’est assise Thérèse pour voir défiler devant elle l’univers, c’était peut-être bien le pommier du Cantique. Elle a goûté de son fruit et ce fruit était doux à son palais. Elle a pris racine à son tour, elle est devenue arbre, elle a porté du fruit et c’est à ce fruit qu’on a reconnu l’arbre qu’elle était. Un bon arbre ne peut porter que de bons fruits. Et le secret du bon arbre, Thérèse nous l’enseigne, c’est d’aller se planter au bord des eaux de Dieu et de maintenir ses racines dans le courant. Alors, même si la sécheresse et l’épreuve surviennent de l’extérieur, il ne craint rien. Il ne cesse de « tirer le bien du trésor de son cœur qui est bon ».

Sr Marie-Raphaël 

*En italique : les lectures que nous avons choisies

dimanche 9 octobre 2011

Heureux les invités


28e dimanche du Temps Ordinaire Année A (2011)
 
 
« Tu prépares la table pour moi devant mes ennemis ;
tu répands le parfum sur ma tête, ma coupe est débordante »
 
En ce dimanche, les extraits des Ecritures nous parlent de festin et de réjouissances.
Dans le Premier Testament, le Seigneur de l’univers en conçoit le projet.
Selon les mots du prophète Isaïe, Dieu « préparera pour tous les peuples, sur sa montagne, un festin de viandes grasses et de vins capiteux, de viandes succulentes et de vins décantés ».
Si la perspective est future, « eschatologique », comme disent les théologiens, il ne faut pas s’y tromper : certes, cette réalité atteindra une plénitude dans l’au-delà, mais c’est aujourd’hui que Dieu veut préparer ce festin pour chacun de nous.
C’est aujourd’hui que Dieu détruit la mort pour toujours, qu’il essuie les larmes sur tous les visages et met fin à l’humiliation de son peuple.
Dieu veut nous partager sa Joie… et nous sommes invités à y ouvrir notre cœur !
 
Dans l’Evangile, le propos de Jésus fait écho au message du prophète Isaïe.
Jésus s’exprime par une parabole.
Nous en avons déjà entendu quelques-unes ces derniers dimanches.
Jésus nous instruit, comme il le fit jadis, tant pour ses disciples que pour ses adversaires.
Dans cette parabole, le Royaume des Cieux est au cœur de la prédication de Jésus :
« Le Royaume des Cieux est comparable à un roi qui célébrait les noces de son fils ».
Remarquons d’emblée que la comparaison ne porte pas tant sur le roi que sur les noces qu’il organise.
Nous pouvons donc épingler ce premier élément : le Royaume est comparable à des noces.
Mais voyons ce que Jésus nous en dit.
Le roi envoie ses serviteurs pour appeler les invités. Cette coutume de renouveler l’invitation à l’heure du repas était une marque de politesse, que pratiquaient les gens distingués de Jérusalem.
Mais première surprise : les invités ne veulent pas venir !
Le roi ne se décourage cependant pas ; il envoie d’autres serviteurs et qui plus est, vante le menu : « les bœufs et les bêtes grasses sont égorgés ».
Surgit alors une deuxième surprise : non seulement les invités récusent l’invitation pour y préférer leurs affaires, mais en plus, ils maltraitent et tuent les serviteurs du roi.
Ainsi, après avoir eu le soin de punir les coupables, le roi formule une nouvelle invitation, mais à l’intention de ceux qui se trouvent « aux croisées des chemins… les mauvais comme les bons ».
Dès lors, « la salle de noces fut remplie de convives ».
 
On peut imaginer qu’ici se terminait une première parabole.
La seconde partie de notre Evangile, à propos de l’homme qui ne portait pas le vêtement de noces, ne lui était primitivement pas associée. Ce devait être une parabole indépendante, comme nous l’apprend le passage parallèle dans l’évangile de Luc.
Nous pourrons en reparler à une autre occasion…
 
Revenons à la première parabole de cet Evangile.
Qui sont les invités auxquels Jésus fait allusion ?
Qui sont ceux qui se détournent de l’invitation pour vaquer à leurs affaires ?
Et qui sont ceux qui sont aux croisées des chemins, mauvais et bons ?
 
Une première interprétation renvoie à l’époque de Jésus, où ses adversaires ne pouvaient accepter que la Bonne Nouvelle soit annoncée aux pauvres et autres pécheurs.
Par les paraboles, Jésus les interpelle :
Vous n’avez pas reçu la Bonne Nouvelle !
Vous n’avez pas répondu à l’invitation aux noces !
Vous ne vous êtes pas réjouis du salut offert !
Vous étiez invités, mais nous ne vous en êtes pas montrés dignes !
A présent, ce sont les pauvres qui sont appelés !
C’est aux pécheurs que la Bonne Nouvelle est annoncée !
 
Mais, outre les contemporains de Jésus, cette parabole nous est aussi adressée, à nous, aujourd’hui.
Chacun et chacune de nous, quels invités sommes-nous ?
Lorsque le Seigneur nous convie à sa table, celle de la Parole, du Pain et de la Fraternité, préférons-nous vaquer à nos affaires ou prêtons-nous l’oreille à l’invitation de notre Dieu ?
 
Festin de la Parole, où Dieu nous partage son rêve de bonheur, son désir d’une vie surabondante pour tous et toutes.
Festin de Pain, où Dieu veut susciter et rassasier une faim de Paix, une aspiration à la justice et au partage des ressources entre les peuples.
Festin de Fraternité, où Dieu appelle tous les hommes à mettre en commun leurs richesses et à fonder leur vie sur le roc de la solidarité.
Festin où Dieu révèle son Amour, plus fort que toute mort…
 
Jésus interpellait ses contemporains.
L’Evangile nous interpelle de la même façon en ce jour…
Qu’allons-nous répondre à cette invitation, au désir de notre Dieu de nous partager ses « viandes succulentes et ses vins décantés » ?
 
« Grâce et bonheur m’accompagnent tous les jours de ma vie ;
j’habiterai la maison du Seigneur pour la durée de mes jours »
Sr Marie-Jean 
 

dimanche 2 octobre 2011

De la passion du Père à la passion du Fils

27èmè dimanche dans l'année : Isaïe 5,1-7;Philippiens 4,6-9 ; Matthieu 21,33-43
 
Dira-t-on en entendant ces lectures que notre Dieu n'est pas un passionné? Oui la passion de Dieu pour son peuple, voilà ce qui est offert aujourd'hui à notre méditation.
 
Mon ami avait une vigne sur un coteau plantureux. Il en retourna la terre et en retira les pierres pour y mettre un plant de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et y creusa un pressoir..." Il a tout fait pour en obtenir de beaux fruits.
Tous les amateurs de vergers, de potagers, de fleurs...et de bon vin comprendront cette impatience amoureuse du vigneron en attente de la vendange... Impatience amoureuse de Dieu devant son peuple élu, aimé, choyé... Et la déception devant la maigre récolte est à la mesure de la peine qu'il s'est donnée.
La sentence semble bien dure à entendre. « Je vais enlever sa clôture pour qu'elle soit dévorée par les animaux; ouvrir une brèche dans son mur pour qu'elle soit piétinée ; j'en ferai une pente désolée, elle ne sera ni taillée,ni sarclée »... bref je décide de l'abandonner.
 
dur dur!!! Si les parents agissaient ainsi avec leurs ados qui se révoltent et prennent des chemins opposés à ceux qu'ils leur proposent... !!
Oui la menace est sévère mais avez-vous entendu le psaume que nous avons chanté en écho?
"la vigne que tu as prise à l'Egypte - il s'agit bien du peuple hébreu - tu la replantes en chassant les nations, tu déblaies le sol devant elle, tu l'enracines pour qu'elle emplisse le pays... " Tu t'es donné beaucoup de peine pour elle alors "pourquoi as-tu percé sa clôture? les passants y grappillent en chemin, les sangliers la ravagent, les bêtes des champs la broutent."
Et puis ce cri du psalmiste: "Dieu de l'univers, reviens. Visite cette vigne. Fais-nous revenir à toi, que ton visage s'éclaire et nous serons sauvés"
Oui la menace est sévère ! Mais le psaume qui est lui aussi parole de Dieu, parole que Dieu lui-même donne à son peuple ouvre un chemin de prière, un chemin d'espérance. Non que la prière soit comme un formulaire à remplir pour obtenir primes, dispenses ou subsides. Non, Dieu n'est pas la Région wallonne. Les mots de la prière que Dieu nous donne notamment dans les psaumes ne sont pas là pour infléchir le coeur de Dieu mais pour façonner le coeur du croyant. Ce cri du psalmiste: « reviens, fais-nous revenir, que ton visage s'éclaire et nous serons sauvés », ce cri répété dans la prière liturgique va peu à peu travailler le coeur de l'homme, il va y faire naître le fruit que Dieu attend en suscitant l'attitude de foi, d'humilité et de confiance envers Dieu tout prêt à réaliser lui-même ce qu'il attend de nous.
 
Et à entendre la parabole de Jésus, vous voyons bien qu'en fait la passion de Dieu est restée intacte... Jésus nous présente Dieu dans les mêmes termes qu'Isaïe, un vigneron amoureux de sa vigne ... sauf qu'il n'est plus question ici des fruits de la vigne mais des intendants qui refusent de les remettre au propriétaire.
 
Rien ne les arrête dans leur projet de s'approprier ce qui leur a été confié : ils maltraitent et tuent les serviteurs. Dieu alors envoie son Fils. Mais ils se saisissent de lui, le jettent hors de la vigne et le tuent.
La passion de Dieu pour son peuple va entraîner la passion du Fils.
Malicieusement Jésus interroge ses auditeurs : Que va faire le maître du domaine ? « Ces misérables, il les fera périr misérablement, il donnera la vigne en fermage à d'autres vignerons qui lui en remettront les fruits »
 
Vous avez remarqué que dans sa conclusion, Jésus passe sous silence la première sentence : « ces misérables il les fera périr misérablement » ? Sur la croix, il privilégie une autre attitude : 'père, pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu'ils font.' Mais il annonce que sa mort sera le point de départ d'un peuple renouvelé. Voilà qui rend actuelle pour nous aujourd'hui cette parabole. Car ce peuple vise les communautés chrétiennes qui se développent autour des apôtres... communautés dont nous sommes aujourd’hui.. et les héritiers…et les successeurs
 
Nous pouvons donc nous reconnaître dans la vigne que le Seigneur entoure de tous ses soins mais dont il nous dit clairement qu'il en est le propriétaire et qu'il en attend des fruits de justice et de droit. Sans doute nous arrivera-t-il comme au peuple d'Israël, au temps d'Isaïe, de nous éloigner de ce projet de Dieu, de produire des fruits d'iniquité qui n'engendreront que, divisions, guerres détresses de toute sorte.
Rappelons-nous alors l'exhortation de saint Paul : « Priez et suppliez pour faire connaître à Dieu vos demandes »et servons-nous des mots que Dieu lui-même nous donne pour nous ouvrir à son amour et collaborer pleinement à l'établissement du Royaume sur notre terre : Fais-nous revenir à toi Seigneur ! N'arrête pas l'oeuvre de tes mains ! »
Ou reprenons la belle oraison du début de la messe: « Dans ton amour inépuisable, Dieu éternel et tout-puissant, tu combles ceux qui t’implorent, bien au-delà de leurs mérites et de leurs désirs ; répands sur nous ta miséricorde en délivrant notre conscience de ce qui l’inquiète et en donnant plus que nous n’osons demander. »
Sr Elisabeth